Une galerie est, entre autres, « un local d’exposition où se fait le commerce de tableaux ou d’objets d’art ». A cette définition froide, conventionnelle, générale s’oppose le sentiment que j’ai d’une galerie qui est un lieu de rencontre avec des œuvres d’art, mais un lieu de rencontre chaleureux qui mette en valeur les œuvres exposées afin de réduire la distance qui sépare le spectateur d’un univers qui lui est souvent étranger : celui de la création.
Si cela a été, il me semble, le cas jusqu’à présent, l’exposition des pièces de Jean-Paul AZAÏS, spécialement réalisées pour la galerie accoTerre, rend encore plus certaine la nécessité pour une galerie d’être une sorte d’écrin dans lequel les pièces prennent la dimension de véritables bijoux.
Et c’est bien de cela qu’il s’agit cette fois : tant par la forme que par la couleur, les œuvres de Jean-Paul évoquent des perles à l’orient ténébreux et la galerie prend vie à leur contact. Une vie qui n’ambitionne aucunement de leur ravir la vedette, mais au contraire de souligner leur perfection et leur raffinement.
Cela, Jean-Paul l’avait ressenti dès l’ouverture de ce lieu puisque, lors de sa première visite à accroTerre en 2010, il a pris la décision d’y exposer l’année suivante. Et c’est devenu une certitude dès l’ouverture des cartons contenant ses œuvres.
Un mot rapide, pour une fois, sur la technique. Le travail de Jean-Paul est le fruit de son expérience et de son travail méticuleux pour acquérir la « pierre philosophale » à l’aide de fioles et d’éprouvettes qu’il expose ici avec une certaine malice. Les mêmes certainement que celles des céramistes de l’Antiquité auxquels il emprunte formes archétypales et procédés techniques comme l’engobe ou vernis d’argile plus ou moins chargé d’oxyde de fer que le feu, par son apport en carbone, « enlumine ».
Jean-Paul ajoute à cet héritage des nouveautés techniques comme la pose d’engobes successifs à l’aérographe, couches superposées, polies, dont la finesse permet à la lumière d’y pénétrer pour en faire chanter, par diffraction, toutes les nuances et nous porter à la contemplation.
Car c’est de cela qu’il s’agit. A partir de ces « orients ténébreux » ou plutôt de ces extraordinaires cristallisations de noirs, de gris traversées de traînées de vert, de violet ou de rose tendre ou de ces blancs nervurés illuminés de bleu ou de rouge, c’est tout un paysage, voire un univers qui nous est offert.
Comment, en effet, ne pas évoquer les irisations de la goutte de rosée sur une feuille au moment où l’aube cède la place à l’aurore ? La délicate coloration rose de l’arrondi d’un nuage au coucher du soleil ou, à la tombée de la nuit, le bleu du ciel devenant noir et ponctué d’étoiles ?
Est-il alors nécessaire de dire le plaisir que nous prenons à cette remarquable exposition dans laquelle chaque pièce est une fenêtre ouverte sur une nature que nous ne prenons presque plus le temps de regarder ?
Eric Berthon